« Le portail Sud de Chartres est consacré à l’Incarnation, le portail Nord à l’Ascension, le portail central exalte la vision de la majesté. Toutefois la flamboyance et la vivacité de Moissac s’éloignent au profit d’un mélange fait de douceur, de gravité et de hiératisme. Le tympan de Chartres est une synthèse de Moissac et de Carennac. Il emprunte à Carennac l’idée des douze apôtres. Assis sur le linteau, on retrouve chez eux les mêmes attitudes malgré les différences de style. Les vingt-quatre vieillards, qui se rattachent à ceux de Moissac par des « détails de costume, par le savant agencement de la barbe et de la chevelure », ont été sculptés dans les deuxième et troisième voussures. Mais ils se sont assagis. Le champ de leur mouvement a perdu de son amplitude. La majesté remplit à elle seule la totalité de la surface du tympan. La vision s’est adoucie. Peut-être perçoit-on les premiers signes de l’art gothique, le Christ s’est humanisé, il a gagné en douceur ce qu’il a perdu en transcendance tout en conservant un grand hiératisme. Deux des vivants, le bœuf et le lion, à la base de la mandorle du Christ esquissent le même mouvement centrifuge, tout en déjetant le regard vers l’arrière. Néanmoins, le dessin et la mobilité de leurs ailes sont atrophiés, si on les compare à Moissac. L’aigle et l’homme ont été réduits faute de place. Directement tournés vers le Christ, ils n’ébauchent pas l’ombre d’un mouvement centrifuge. Même s’ils n’ont plus « leur aspect de songe », la pureté de leurs lignes, la subsistance d’un fort dynamisme accorde aux quatre vivants une grâce intemporelle.
Page 277 du livre Les Quatre Vivants de Philippe Péneaud, L'Harmattan.
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Auteur : | Philippe Péneaud |
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Editeur : | Editions L'Harmattan (10 avril 2007) |
ISBN-13 : | 978-2296028005 |
Broché : | 314 pages |